mercredi 1 janvier 2020

Bouquet final




2019 s’est terminé pour nous avec l’annonce d’une décision de justice que nous attendions depuis très longtemps. Pour bien comprendre et saisir l’importance de cet acte, il faut remonter à plusieurs années en arrière. Courant 2015, un appel à projet est lancé par la municipalité pour trouver des opérateurs prêts à investir pour créer un ensemble immobilier sur les parcelles communales au cœur de notre village. Quatre candidats (LVH, CFA, Emmery et Quanim-Escrim) envoient un dossier en octobre 2015 et début décembre, le conseil municipal retient toutes ces candidatures pour la suite de la procédure. Après une première étude complète des dossiers, par une commission composée d’élus de la majorité du conseil, du directeur de l’EPIC, d'un avocat de la mairie et de la Directrice des Services Techniques, les candidats sont reçus à la fin du mois d’avril 2016 pour présenter oralement leur projet au jury. Le 31 mai, le conseil municipal vote une délibération pour modifier le règlement du Plan d’Occupation des Sols afin de permettre d’élever les bâtiments jusqu’à 21 mètres. Seul Quanim-Escrim est informé de ce changement qui correspond exactement à son projet.




Le 7 juin, le jury composé d’Etienne Jacquet, Thierry Mirabaud, Elodie Boidard, Alain Musard, du Directeur de l’EPIC, de la Directrice des Services techniques et du Directeur des Services Généraux se réunit pour étudier les différents projets. Celui de Quanim-Escrim est classé en 1ère position par ce jury. Le 20 juin 2016, une délibération est votée pour désigner officiellement le vainqueur. Un vote à bulletin secret est alors organisé : le comptage des voix montre que tous les conseillers de majorité classent le projet de Quanim-Escrim en 1er. 



En juillet l’entreprise CFA non retenue reçoit un courrier de la mairie l’informant du résultat du vote et découvre alors la modification du règlement du POS votée le 31 mai et divers éléments erronés dans le document produit par le jury et servant de base à la délibération. Ce document présente des explications assez surprenantes ! Ainsi certains points relevés sont notés comme des défauts pour CFA et peu, voir pas importants pour Quanim-Escrim… Le candidat malheureux envoie alors un courrier à l’ensemble des conseillers, un courrier qui ne nous est pas transmis et que nous devrons réclamer au maire. Quelques jours plus tard, nous découvrons que le 1er juin, soit 7 jours avant que le jury prenne sa décision, l’entreprise Quanim-Escrim annonçait sur internet sa victoire.




Face à tous ces éléments, nous décidons en août 2016 d’envoyer une requête auprès du Tribunal Administratif de Grenoble pour faire annuler cette délibération. . Nous rassemblons toutes les informations à notre disposition, saisissons un avocat et nous lançons dans cette aventure Les mois, les années passent. Régulièrement, nous nous renseignons sur l’avancée du dossier. Systématiquement, nous obtenons la même réponse « La procédure suit son court … ». Nous précisons que nous avons décidé de ne pas demander de dédommagement financier à la mairie en cas de victoire : en effet il nous semblait que la collectivité disposait d'un budget frais d’avocats et conseillers juridiques en tout genre suffisamment élevé dans l’exercice de son quotidien, sans en rajouter. La mairie en revanche nous réclamait 3 000 euros de dommage en cas de victoire de sa part.




Fin octobre, nous apprenons que notre requête est à l’ordre du jour des audiences du 12 novembre. Face au juge, notre avocat rappelle les éléments clefs du dossier. Le 18 décembre, le Tribunal rend son verdict : il a entendu nos arguments. La délibération du 20 juin 2016 est annulée. Le juge reconnait que « la délibération intervenue aux termes d’une procédure irrégulière car prise en méconnaissance du principe d’égalité entre les candidats » doit être annulée. En d’autres termes, le Tribunal valide le fait que l'un des candidats à l’appel à projet a été favorisé par le maire et son équipe. Le délit de favoritisme est très grave et lourdement puni, d’autant qu’il est assorti d’un autre délit : une rétention de courrier ! Nous n’en sommes pas là mais les termes du juge « procédure irrégulière » et « méconnaissance du principe d’égalité » démontrent la gravité du jugement. Pour lire le document officiel du Tribunal de Grenoble, vous pouvez le télécharger en cliquant sur le lien suivant: 
https://documentcloud.adobe.com/link/track?uri=urn%3Aaaid%3Ascds%3AUS%3A15e48789-f348-4841-8564-00f244eda3e4




En 2016, nous avions vu que les choses n’étaient pas aussi claires que voulait bien le dire le maire des Contamines. Nous nous étions fait entendre en réunion de conseil à ce sujet, mais en vain. Cette annulation par le Tribunal de Grenoble nous confirme que nous avions vu juste. Il apparaît clairement que l’équipe municipale a fabriqué cette procédure d’appel d’offre en ne respectant pas la législation en vigueur. La société Quanim-Escrim a bénéficié de passe-droit pour élever ses immeubles dans le centre du village au mépris de la loi. Le premier magistrat du village et ses conseillers croyaient pouvoir berner la justice et les contaminards mais les ficelles étaient quand même un peu trop grosses. Un règlement sur les constructions changé à la dernière minute, une annonce « en avance » sur internet, … c’est quand on est trop sûr de soi que l’on commet des erreurs… A force de jouer avec la législation, on prend ses administrés pour plus sots qu’ils ne sont !




Avec ce jugement, c’est l’ensemble du projet du centre qui est remis en cause. La délibération étant annulée, Quanim Escrim n’est plus le lauréat…. Tout s’effondre pour le maire des Contamines qui disait pouvoir aménager le centre pendant son mandat. Les projets des précédentes municipalités avaient été stoppés par les urnes, celui-ci est arrêté par la Justice à la suite d’une procédure irrégulière. De plus, cette délibération est annulée à cause d’une faute grave : ce n’est pas un problème administratif (erreur dans la procédure, absence d’un document dans le dossier, …) mais un enchaînement délibéré de décisions avantageant l’entreprise Quanim-Escrim. 

Face à cela, les citoyens des Contamines sont en droit de se poser de nombreuses questions : comment l’ensemble des conseillers de la majorité a pu laisser faire cela sans rien dire ? Comment tous ont accepté de valider cette procédure irrégulière ? Il ne faut pas oublier que toutes les délibérations liées à cette opération ont toujours été votées par l’ensemble de l’équipe municipale. Quid de la responsabilité des élus ?! De plus le maire s’était entouré de nombreux conseillers juridiques en interne et en externe, au frais du contribuable bien sûr. Certains ont participé à cette comédie, validant les différentes étapes de l’appel à projet. 

Durant les 6 années de son mandat, Etienne Jacquet a toujours motivé ses décisions en s’appuyant sur les directives de Justice. Ainsi, il voulait apparaître comme le chevalier blanc, n’hésitant jamais à vilipender ses prédécesseurs quand une convention n’avait pas été renouvelée dans les délais ou des documents officiels n’avaient pas été adaptés à une nouvelle version de la loi. Mais il apparaît clairement que le chevalier n’est pas aussi blanc qu’il veut bien le faire croire mais plutôt gris foncé.




A la suite de cette décision du Tribunal de Grenoble, certains écrits d’Etienne Jacquet en 2014 prennent un nouveau sens, presque une prédiction de l’avenir qu’il promettait à ceux qui ne le connaissaient pas…. Ainsi, dans le trombinoscope des candidats, il expliquait que sa première motivation était « d’opérer un changement profond, […] dans le respect du droit et des personnes, dans la transparence et l’équité ». Il faut croire que cette motivation a vite disparu ou qu’elle était mensongère. Dans un autre tract distribué pendant la campagne, la tête de liste expliquait : « Nous ne pouvons plus confier notre destin à des élus qui imaginent toujours que favoriser la somme des intérêts particuliers équivaut à préserver l’intérêt général ». Plus loin il critiquait vivement la gestion d’une commune éloignée de la légalité, du respect humain et des valeurs de fraternité qu’il déclarait avoir toujours défendues (sic). Il finissait en ajoutant qu’il « faut que nos responsables comprennent que l’altitude de notre village ne les met pas au-dessus des lois, que la durée de leur vie politique ne les rend pas intouchables » (Demain les Contamines février 2014). Pour une fois, nous sommes totalement d’accord avec lui.

Si le projet immobilier du centre est ainsi stoppé, l’équipe municipale en est la seule responsable. Il suffisait de suivre strictement la loi, le projet aurait pu avancer sans problème. Peut-être serait-il déjà presque terminé ? Quand le projet s'éternisait, il était si simple d’accuser publiquement le collectif de citoyens Cocicomo de bloquer le projet du centre en se victimisant. Nous reconnaissons là toujours le même fonctionnement utilisé depuis 6 ans. Il ne faut pas oublier que le maire n’a pas hésité à menacer de poursuites judiciaires les membres du Bureau de ce collectif. La roue a tourné et les poursuites risquent bien de changer de côté. L’arroseur arrosé….



Nous ne pouvons cacher notre satisfaction d’avoir été entendu par la Justice et de voir cette délibération aujourd’hui annulée. C’est pour nous un symbole très important de ces 6 années qui ont vu la mise en place à la mairie d’un système non conforme à notre vision de ce que doit être la gestion d’une commune. Le service public et les élus sont au service des citoyens et non le contraire. Même en étant dans l’opposition, relégués à un rôle mineur face à une majorité ignorant nos remarques, nous avons pu faire annuler l’une des délibérations les plus importantes de ce mandat. Nous le devons à tous ceux qui nous ont apporté leur soutien sans faille, leur aide et bien sûr, à notre avocat qui s’est fortement impliqué sur ce dossier et qui a pu apporter au mieux au juge nos arguments. Les adhérents de Cocicomo ont été des acteurs clés dans cette réussite. Nous en profitons d’ailleurs pour relayer un appel du Collectif Citoyen des Contamines Montjoie qui a besoin d’un soutien financier nécessaire à la poursuite des procédures encore engagées ou à démarrer prochainement ! N’hésitez pas à adhérer ou à faire des dons ! 
(cocicomo74@gmail.com)



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Il y a quelques mois, nous avons pris la décision d’arrêter la publication de nos articles dans ce blog ce 1er janvier 2020. Dans moins de 3 mois, les urnes auront rendu leur verdict. Comme ni l’un ni l’autre n’avons l’intention d’être candidat à un nouveau mandat de conseiller, nous avons jugé plus sage, maintenant, de laisser s’exprimer toutes celles et ceux qui postulent à occuper ces fonctions. Le hasard du calendrier judiciaire nous fait un beau cadeau pour la fin de cette aventure.

Ce blog est né en septembre 2014 quand nous avons compris, à la suite de notre exclusion de toutes les commissions municipales, que notre rôle de conseillers devrait se résumer à faire de la figuration. Nous avons constaté ensuite que les conseillers de la majorité occupaient parfaitement ce rôle : en 6 ans, jamais une remarque négative ou positive, jamais un avis spontané, la plupart d’entre eux n’a jamais ouvert la bouche en séance du conseil. Le mot délibération n’a jamais été aussi mis à mal que depuis le début de ce mandat !

Dans notre premier article nous écrivions : « afin de pouvoir exister réellement en tant que conseillers municipaux, nous avons pris la décision de créer ce blog pour vous informer de notre situation, pour vous donner notre avis sur les décisions qui sont prises par le maire (et son équipe) et pour vous permettre de vous exprimer sur les sujets qui touchent notre commune. Ce blog s’appelle « La Vigie du Conseil ». Une vigie, c’est le poste d’observation d’un navire. C’est aussi celui qui observe l’horizon et prévient des dangers. C’est celui, qui, avec un peu de mépris est envoyé en haut du mat, souvent oublié, jamais consulté pour les décisions, mais son rôle peut être essentiel en cas de danger. Cette définition correspond à notre position à l’intérieur du conseil, même si nous avons souvent l’impression que certains préféreraient nous voir enchaînes en fond de cale ou carrément jetés à la mer. »




192 articles plus tard, nous avons la satisfaction du devoir accompli. Nous avons suivi le rôle que nous nous étions fixé à l’origine. Au fil des semaines, puis des quinzaines, nous vous avons communiqué les informations que nous pouvions obtenir et en expliquant pourquoi telle ou telle décision nous apparaissait contraire à l’intérêt du village. Nous n’avons jamais pensé détenir la vérité mais nous voulions exprimer notre vision. Les Contamines-Montjoie restent un village où règne encore, la liberté d’expression ! Peut-être certains propos ont choqué, d’autres, sûrement, ont dû agacer. Nous nous excusons auprès des personnes que nous aurions pu blesser involontairement par une phrase mal venue. 

Bien que minoritaires dans le conseil municipal, nous avons la conviction que, grâce à ces articles, nous avons permis de bloquer ou de freiner certains projets de l’équipe municipale. Ainsi par exemple, nous avons pu alerter les habitants permanents ou non du village sur les risques courus par le site de Notre-Dame de la Gorge, nous avons vu la menace qui pesait sur le chemin du Praz, nous avons pu présenter à tous le projet immobilier qui allait défigurer le centre de notre village, … Ensuite la mobilisation de tous a permis de montrer à l’équipe municipale la forte opposition à ses projets.




Cette forte mobilisation nous a poussés à continuer la publication des articles jusqu'à ce jour. Le nombre très élevé et constant des visites sur le blog (1470 visites en moyenne) et les pics de fréquentation chaque 1er ou 15 du mois sont les preuves du fort intérêt pour notre travail. Aujourd’hui, la vigie quitte son poste de surveillance. Cela ne veut pas dire que tout danger est écarté. Nous espérons que d’autres sauront prendre la relève, à leur façon, s’ils jugent que l’intérêt général de notre village est un jour menacé, si d’autres alertes devaient être lancées.

Il nous reste à remercier Jean-Yves Raffort qui a remplacé Lydie dans les conseils municipaux, Nelly, qui pour chaque article nous signalait nos fautes d’orthographe et savait nous proposer de meilleures formulations, tous celles et ceux qui partageaient nos articles à leurs amis (dans le monde virtuel ou réel), tous celles et ceux qui nous ont témoigné leur soutien et leurs encouragements tout au long de ces 5 années.





Enfin, en ce 1er janvier, nous tenons à vous présenter nos meilleurs vœux pour 2020. « Certains lisent le passé, d’autres prédisent l’avenir, assurons ensemble le présent », cette maxime aurait pu être notre devise…. Nous souhaitons à notre village un avenir plus souriant. Que chacun, après mars 2020, voit renaître le sourire et l’envie d’avancer pour le bien collectif, même si, en politique, jamais rien ne peut être parfait…. Souhaitons à notre commune des années sereines et guidées par une honnête et réelle volonté d’investissement pour la collectivité. A l’aube de cette nouvelle décennie, nous espérons sincèrement le meilleur pour notre village et ainsi que pour tous ses habitants.



Lydie Roch-Dupland et David Mermoud


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