lundi 14 septembre 2015

Un document accablant

La semaine dernière, nous sommes allés à Lyon, très précisément sur les quais de la Saône, à la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Rhône Alpes (DRAC). Notre but était de consulter le dossier qui a abouti à l’inscription de l’église de Notre-Dame de la Gorge au titre des monuments historiques. 



En parcourant ces documents, nous avons fait une découverte qui nous a sidérés. Comme nous l’avons expliqué dans nos précédents articles sur le dossier de la Gorge, la commission chargée de statuer sur la demande de la commune s'est réunie en octobre 2014. Parmi les documents, nous avons trouvé le procès-verbal de cette commission. Ce compte-rendu présente clairement l’historique fait par la chargée d’études documentaires qui a travaillé sur le dossier, les différents avis scientifiques et techniques des experts, la retranscription des discussions avant le vote final et en conclusion, les résultats du vote de la commission.

En lisant ce document, nous avons appris que la demande de protection date de 2004, et ce, grâce à Valérie Horellou et à son conseil, puis que le dossier a été présenté pour une première sélection en juin 2009. Il a donc fallu 10 années pour aboutir à la décision de cette commission : « Après un vote, la commission émet, à l’unanimité un avis favorable à l’inscription au titre des monuments historiques de la chapelle Notre-Dame de la Gorge aux Contamines-Montjoie considérant sa qualité architecturale, son environnement préservé ainsi que l’intérêt historique et l’histoire culturelle qui s’y rattache. La commission émet le vœu que le périmètre de protection prenne en compte l’intégralité du chemin ainsi que les quinze oratoires ».



C’est bel et bien un vote unanime qui a abouti à cette protection et la lecture des différents avis des experts nous montre qu’à plus de 200 km, les différentes personnes chargées d’instruire ce dossier ont vu la qualité propre de ce lieu et ont compris la nécessité de le protéger.

En parcourant ce document, notre attention a été attirée par quelques mots au bas d’une page : « Avis de la commune des Contamines-Montjoie : avis défavorable ». Comment ça : « avis défavorable » ? Puisque c’est notre commune qui est à l’origine de cette demande, comment peut-elle s'y opposer ? Nous avons alors interrogé la personne chargée du dossier pour savoir s’il ne s’agissait pas d’une erreur de transcription. Et sa réponse nous a laissés sans voix. Pendant l’été 2014, au moment où elle préparait son dossier en vue de la commission, elle a contacté la mairie des Contamines et lors de cet entretien, elle a compris qu’il y avait un problème. Elle a alors demandé l’avis officiel de notre commune en vue de la décision de la Commission du Patrimoine et des Sites. 

L’avis défavorable de la commune des Contamines-Montjoie indiqué sur ce document n’est donc pas une erreur. Le maire et ses conseillers municipaux ont clairement cherché à s’opposer au fait que l’église de Notre-Dame de la Gorge soit reconnue comme monument historique. 



Après la surprise, nous étions face à un sentiment de totale incompréhension. Comme est-il possible qu’une équipe municipale puisse agir contre les intérêts de sa propre commune ? En effet, cette décision de la DRAC va apporter de multiples bénéfices à notre village : au-delà de la reconnaissance de l’intérêt du lieu, de la possibilité d’utiliser le logo « Monument Historique » dans toutes nos publications, du référencement dans divers ouvrages, c’est un atout supplémentaire au point de vue touristique pour inciter les personnes à visiter ce lieu. De plus, la commune va pouvoir bénéficier de précieux conseils techniques pour la protection du site et solliciter l’obtention d’importantes subventions pour la restauration de l’église, de nombreux organismes réservant leurs aides financières aux monuments inscrits ou classés. Pourquoi vouloir ôter cette chance au village ?

Bien sûr, il fallait absolument que cet avis défavorable reste caché. Cette décision n’est vraiment pas en accord avec les beaux discours habituels du maire sur l’importance de la préservation du patrimoine de notre village ou sur la nécessité de privilégier constamment l’intérêt général de la commune. Nous comprenons maintenant pourquoi nous n’avons pas eu de réponse à notre récente demande de consultation en mairie du dossier sur la demande de classement de l’église de Notre-Dame de la Gorge. 

Cette hypocrisie a atteint son apogée cet été lors de l’assemblée générale des Amis des Contamines. Lors de cette réunion, le maire a annoncé fièrement « le 22 juin, on a fait classer comme monument historique, l’église de Notre-Dame de la Gorge ». Cette phrase prend aujourd’hui une dimension particulière quand on sait que 6 mois auparavant le premier magistrat de notre commune manœuvrait en coulisses pour faire échouer ce classement. Cela discrédite les propos passés ou futurs de l’équipe municipale. Comment croire un maire qui n’hésite pas à venir face à ses concitoyens affirmer le contraire de ce qu’il fait réellement ? Et n’est-ce là que l’arbre qui cache la forêt ? 

Certes, cet avis défavorable n’est pas condamnable légalement, mais moralement sans aucun doute. En voulant s’opposer à une décision de la DRAC qui venait couronner le travail réalisé par l’ensemble des conseils municipaux des Contamines depuis 40 ans et en le cachant sciemment, le maire a fait une lourde faute. Ces méthodes mettent en lumière une facette peu glorieuse de sa gestion communale.

Alors pourquoi ? Pour qui ? Pour quelles raisons l’équipe municipale ne souhaitait pas que la procédure de classement aboutisse ? Nous savons que des projets sont en cours de préparation dans le secteur de la Gorge. Le maire a d’ailleurs justifié son avis défavorable auprès de la DRAC, en prétextant ces projets, sans évoquer évidemment les permis en préparation à côté de l’église. Risquaient-ils d’être compromis ? La Maison de la Réserve / du tour du Mont-Blanc, à la place du bâtiment EDF, peut être réalisée même si l’église est inscrite. Sa proximité avec un monument historique peut même valoriser ce projet. Le parc floral peut aussi être aménagé dans ce site protégé sans aucun problème. Le projet du zoo risque, lui,  d’être remis en cause. Est-ce pour construire un ridicule parc à marmottes que l’équipe municipale était prête à sacrifier la protection d’un joyau du baroque ? Difficile à croire



L’énoncé de ces faits amène chacun d’entre nous à se questionner sur l’envers du décor des projets de l’équipe municipale. On peut imaginer toutes sortes de choses. D’autant plus que lors de notre visite à la DRAC, la personne responsable du dossier nous a confirmé que la commune a eu connaissance de la décision de la commission dès le tout début du mois de décembre 2014. Toute l’effervescence autour du secteur de la Gorge en janvier (signatures du bail avec EDF, dépôt des 2 permis) n’est pas une pure coïncidence ! Il fallait agir vite avant que le préfet de région ne signe son arrêté officialisant l’inscription au titre des monuments historiques, décidée le 16 octobre par la commission.

Grâce à notre visite à la DRAC, notre connaissance du dossier « la Gorge » a largement progressé. De prochaines révélations permettront-elles de dévoiler ce qui reste encore caché ?


Petit récapitulatif non exhaustif :
  • 2004 : dépôt par la commune du dossier à la DRAC en vue de l’inscription de l’église de Notre-Dame de la Gorge au titre des monuments historiques
  • Juin 2009 : présentation du dossier en délégation permanente de la commission régionale du patrimoine et des sites.
  • Eté 2014 : avis défavorable de la commune à cette inscription
  • 19 octobre 2014 : la commission émet, à l’unanimité un avis favorable à l’inscription au titre des monuments historiques de la chapelle Notre-Dame de la Gorge
  • 27 novembre 2014 : établissement du  procès-verbal de cette décision.
  • Avant le 10 décembre 2014 : arrivée en mairie de l’information relative à cette décision.
  • Janvier 2015 : dépôt des 2 permis de construire à Notre-Dame de la Gorge
  • Janvier 2015 : vote par la majorité du conseil d’un bail emphytéotique avec EDF
  • Mai 2015 : vote par la majorité municipale d’un bail emphytéotique avec l’Association Missionnaires d’Entraide Salésienne
  • 19 juin 2015 : le maire accorde les 2 permis de construire malgré l’avis défavorable de l’ABF
  • 22 juin 2015 : Notre-Dame de la Gorge est inscrite officiellement au titre des monuments historiques par arrêté préfectoral

… Chacun tirera les conclusions de cette liste de dates …

Le recueil des signatures pour la pétition "Notre Dame de la Gorge en danger" prendra fin cette semaine. Si vous ne l'avez pas encore fait, il reste peu de temps pour signer afin de protéger le site de la Gorge.


A bientôt pour de nouvelles infos.

Lydie Roch-Dupland et David Mermoud

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